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Les 10 joueur.se.s et le staff de l’équipe de France lors du stage organisé à Niort en mars 2020.

Foot fauteuil : les Bleus, champions du monde, partent à la conquête de leur deuxième étoile

Sacrée championne du monde en 2017 face aux Etats-Unis, l’équipe de France veut conserver son titre lors des prochains mondiaux dans un an et demi. Un objectif ambitieux pour ce groupe jeune mais qui bénéficie de l’excellent niveau technique du foot fauteuil français. Beaview les a suivis lors d’un stage de préparation à Niort.

L’ambiance est grisâtre ce mardi matin, 2 mars 2020, au complexe de la Venise verte, dans le sud-ouest de Niort. Il ne fait pas plus de 10°C dans la salle de sport, transformée pour la semaine en camp d’entraînement destiné à la préparation de l’équipe de France de foot fauteuil. Champions du monde depuis leur succès en Floride face aux tenants du titre américains, les Français entament leur course contre-la-montre pour recréer l’exploit à l’automne 2022, lors du prochain Mondial en Australie.

Photo : © Après le déjeuner et avant de reprendre l’entraînement, les Bleus analysent des séquences de jeu de leur finale européenne perdue contre l’Angleterre l’année dernière. / Beaview – Vincent Lenoir
Photo : © Après le déjeuner et avant de reprendre l’entraînement, les Bleus analysent des séquences de jeu de leur finale européenne perdue contre l’Angleterre l’année dernière. / Beaview – Vincent Lenoir

Au programme de la semaine : séances collectives à thème, rencontres avec des clubs locaux, analyses vidéos et entretiens individuels. Avec le double objectif de faire progresser l’équipe – dans ce sport où la concurrence des autres nations est de plus en plus forte – et d’intégrer les nouveaux joueurs, dont certains sont très jeunes et n’ont pas encore une grande expérience du haut niveau.

David Vergé, entraîneur de l’équipe de France de foot fauteuil.
Photo : © David Vergé, entraîneur de l’équipe de France de foot fauteuil. / Beaview – Vincent Lenoir

L’entraîneur de l’équipe, David Vergé, et son adjoint, Thierry Descamps, ont convoqué 10 joueur.se.s, tous issu.e.s de Division 1, l’élite du championnat de France, parmi lesquels ne figurent plus que 4 joueurs présents lors du sacre de l’été 2017. D’autant que l’équipe de France reste sur une défaite lors du dernier Euro, en mai 2019, après sa finale perdue contre les Anglais. « On avait le niveau pour gagner cette compétition, c’est un échec sportif, analyse David Vergé. Mais il peut nous servir pour la suite. On mène 2 à 0 et on continue à avoir des objectifs très élevés alors qu’il faut savoir fermer le jeu et tenir le score. Et le staff aussi est responsable, on était derrière les joueurs pour aller chercher le troisième but. » Une ambition qui leur a coûté cher puisque l’Angleterre est revenue au score sur deux contre-attaques. Les joueur.se.s, très lucides, l’ont analysée lors d’une séance vidéo.

Tous sont d’accord : pour rester au plus haut niveau, il faut s’améliorer en mettant l’accent sur la tactique. Le foot fauteuil a vécu une révolution au début des années 2010 avec l’arrivée des fauteuils Strikeforce qui ont apporté une vitesse considérable dans le jeu. Le niveau technique général augmentant également, les différences individuelles ne sont plus suffisantes pour faire gagner l’équipe au niveau international. Un discours partagé par le capitaine Bryan Weiss qui explique avoir été un joueur très individualiste avant d’intégrer le groupe France, et qu’il a été obligé de se fondre dans le collectif pour se conformer au haut niveau. Même discours pour Malaurie Pouchet, qui porte le maillot bleu depuis deux ans : « Individuellement, je trouve qu’on est tous très forts, mais on doit vraiment bosser sur notre collectif et réussir à respecter nos schémas de jeu jusqu’au bout lors des matchs. »

Malaurie Pouchet et les champions du monde Bryan Weiss (à gauche) et Julien Reniers.
Photo : © Malaurie Pouchet et les champions du monde Bryan Weiss (à gauche) et Julien Reniers. / Beaview – Vincent Lenoir

L’intérêt de ces rassemblements ne concerne pas seulement l’équipe de France. Les joueurs expliquent que c’est l’ensemble du foot fauteuil français qui bénéficie de l’expérience emmagasinée par l’exigence du niveau international, comme Julien Reniers, 30 ans (dont 20 années de foot fauteuil) : « L’équipe nationale est un moteur pour le championnat. Lorsqu’on passe une semaine à jouer avec d’autres joueurs, à voir d’autres tactiques, on apprend. Et les clubs en profitent lors de notre retour de stage ou de compétition. »

Réunissant plus de 500 sportifs en compétition* pour environ 70 équipes inscrites en championnat, le foot fauteuil français fait figure de modèle mondial. Mais son équilibre reste précaire, la faute au manque de moyens notamment due au fait que la discipline n’est pas olympique et ne compte donc aucun salarié au sein de sa commission sportive (rattachée à la fédération handisport), un problème pour ce sport qui génère une logistique lourde : « Tout le foot fauteuil français fonctionne au bénévolat, détaille Farid Rouidjali, le directeur sportif de la commission sportive foot fauteuil. Pourtant il intéresse plein de monde ! Quand les gens essayent ils veulent toujours revenir mais ce n’est pas toujours facile. » Les déplacements sont parfois très longs (comme l’exemple de ce joueur habitant à Brest et licencié à Châtenay-Malabry, en région parisienne) et le matériel très coûteux. Le prix d’un Strikeforce s’élève à près de 12.000 euros, sans prise en charge de la Sécurité sociale car il ne peut servir de fauteuil de vie. Et l’essentiel du budget de la commission foot fauteuil (environ 60.000 euros pour cette saison) va au fonctionnement, achats de matériels, défraiement des bénévoles (staff, arbitres, etc.) pour l’organisation des stages et des matchs.

« On est des passionnés, résume le sélectionneur David Vergé qui, comme tout le monde, doit poser des jours de congés pour ces stages biannuels, en plus des compétitions. On aimerait aussi que les joueurs puissent s’entraîner plus d’une fois par semaine avec leur club, mais il faut faire avec. » L’entraîneur souhaiterait également pouvoir convoquer deux joueurs de plus à chaque rassemblement de l’équipe de France afin de mettre en place ses ambitions de « jeu total », fondé sur un bloc équipe et beaucoup de vitesse et de déplacements. Quitte à faire des déçus qui ne feront pas partie des huit sélectionnés au Mondial ? « Les joueurs ont intérêt à ce que la concurrence s’installe parce que ça fait progresser tout le monde », évacue David Vergé qui veille au bon état d’esprit du groupe en responsabilisant les anciens. Une méthode qu’il dit avoir puisée chez ses prédécesseurs, Bernard Berthouloux et Ricardo Riso, les artisans du premier titre mondial. Rendez-vous à Sydney pour voir si la méthode fonctionne et si le foot fauteuil français parvient toujours à briller.

David Vergé, attentif, lors d’une séance collective du groupe France
Photo : © David Vergé, attentif, lors d’une séance collective du groupe France. / Beaview – Vincent Lenoir

Article mis à jour le 30/06/2020

*Note : en raison de la Covid-19, les compétitions des clubs en France (2019-2020) sont interrompues et annulées.

Un article de Vincent Lenoir

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